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Reflets du Passé

Actualité de l'auteur et de sa collection aux éditions Dualpha, ayant vocation à exhumer des textes toujours d'actualité. Thèmes abordés : Magie,illusionnisme, prestidigitation, ésotérisme. Pour tous contacts avec la rédaction de ce blog, pour poser vos questions, et pour être averti de nos nouvelles mises en ligne : refletsdupasse@gmail.com Attention tous les textes mis en ligne sur ce blog sont soumis au Droit d'Auteur.

samedi 31 août 2013

LA CORDE HINDOUE



(texte extrait d'un tour du Monde de la Magie et des Illusionnistes de Richard Raczynski).
Ce tour est associé en partie aux mythes de l’Inde, même si sa racine historique semble provenir de l’ancienne Capitale chinoise des Song du Sud.
Le premier témoignage s’y référant concrètement est celui du géographe marocain Ibn Battuta de passage en Chine en 1355 (in Voyages, Inde, Extrême-Orient, Espagne & Soudan). Il relate le tour, exécuté par un magicien de la Cour d’Amir, à Hangzhou (alors la ville la plus peuplée du monde) : lançant en direction du ciel une balle de cuir à lanières (comparable à une pelote de laine) qui laisse redescendre une corde, il enjoint à l’un de ses jeunes assistants d’y monter.
Celui-ci semble disparaître en arrivant à son extrémité.
Ulcéré, le magicien grimpe à son tour, armé d’une machette, faisant retomber sur le sol les membres ensanglantés de son assistant, qu’il reconstituera peu après.
On voit dans cette description, le caractère hautement rituel d’un effet qui associe illusionnisme et message céleste : la corde devenant escalier ou l’échelle capable d’établir une passerelle entre ciel et terre. Le yogi en lançant la corde en l’air la relie au ciel (aux dieux), puis monte rechercher son assistant (ou disciple) qu’il met en pièces pour mieux le faire renaître.
On se retrouve ici, au niveau allégorique entre la descente du Bouddha et la résurrection du corps d’Osiris, dans le thème du démembrement auquel succède la réunion de « ce qui est épars » chère aux sociétés initiatiques.
(Sur le récit : Amir semble orienter ici vers émir, signifiant communément : représentant de l’Autorité. Si la dynastie Yuan était maître d’Hangzhou en 1279, sa chute allait débuter justement en 1335).
Une variante hindoue, fait dire à un prince, témoin d’une scène identique : « (…) Le magicien ramassa les morceaux et les réunit sous sa robe. Peu de temps après, il souleva sa robe et le petit garçon en sortit intact, sous les yeux de tous ».
Des tours similaires (ou reprenant simplement la corde rigidifiée à laquelle grimpe un enfant) sont rapportés par des voyageurs entre le XIVe et le XVIe siècle.
Leurs localisations sont en général au Tibet et en Inde.
Ainsi l’explorateur anglo-néerlandais du XVIIe siècle Godofridus van Broekhuisen (dit Edward Melton) signe en 1681 un récit sur la corde indienne (in An English nobleman't strange and memorable voyages and travels).
Dans une période plus moderne, autour du XIXe siècle, des témoins britanniques s’en font l’écho dans la presse, comme l’atteste le récit de Lady Waghorn en 1892 paru dans The Daily Mail.
Témoignage similaire chez un ressortissant hollandais du nom de Bodalin alors à Calcutta.
Cette corde hindoue marque aussi les esprits des majors anglais de l’armée des Indes : ainsi un sergent du régiment des East Surreys confie au Daily Mail en 1919 : « (…) Un vieil Hindou entra un matin dans le camp. Il portait un petit panier, une longue corde assez épaisse sur l’épaule et deux petits garçons l’accompagnaient… Il jeta subitement l’une des extrémités de la corde en l’air : celle-ci resta rigide, sortant de sa main, comme tirée vers le ciel par une autre main invisible. Un des garçons grimpa le long de cette corde, à la force des poignets… Je l’ai vu, je vous l’affirme ».
Preuve que le tour survient fréquemment dans le quotidien, sans préméditation, du moins en apparence.
Très vite cette suprématie « magique » va se heurter à l’esprit d’analyse de l’homme blanc, tels ces observateurs, résolument rationalistes qui estimeront que « (…) La corde était creuse et renfermait à sa base un système de tubes métalliques ».
D’autres insistent sur la mise en scène qui entoure la « montée » de la corde précisant « (…) Quant à la fameuse corde hindoue, on l'a toujours vue se dresser au crépuscule, entre deux arbres ».
Un autre aspect est soulevé, découlant directement des phénomènes individuels ou collectifs dits d'autosuggestion, engendrant chez le spectateur une vision quelque peu détournée de la réalité.
Rapidement, le sensationnel et la légende faisant vendre, des magiciens professionnels tentent d’intégrer ce tour à leurs programmes comme l’Américain Howard Thurston (1869-1936) en 1927 et le Russe Kio (1894-1965, voir notices).
Cette présentation moderne n’entretenait pourtant plus aucune forme d’équivoque, « ici tout n’était que trucage ».
Bibliographie :
Victor Henry (1850-1907), La Magie dans l’Inde antique, Paris, Éditions Ernest Leroux, 1909.
Jean Boulet, Le Truc de la Corde, Paris, 1953.
Claude Klingsor, Les Grandes illusions américaines, p. 191, 1977.
Dr. Jean de Mutigny, Toute la vérité sur l’hypnose, (in chapitre IV).
Fanch Guillemin, Les Sorciers du bout du monde, 1988.
Harry Kellar, John Nevil Maskelyne, and Others, Oriental Magic Described and Explained,
David Meyer Magic Books, Glenwood, 1992.

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