mardi 8 novembre 2016
PHILIDOR (Paul de Philipstal) - ROBERTSON (Etienne-Gaspard Robert, 1764-1837), Jean-François LE BRETON (1762-1838).
Jean-Gabriel-Auguste Chevallier (1778-1848) dans Le conservateur de la vue : suivi du manuel de l'ingénieur opticien, (à Paris, chez l’auteur, 1845), revient dans De la Fantasmagorie (chapitre XXIII) sur les historiens ayant abordé le sujet et les grands noms de la scène parisienne.
Dont JEAN-FRANCOIS LE BRETON (1762-1838 - Cabinet de physique et de fantasmagorie, rue de La Poste, faubourg Saint-Germain, en 1814).sur lequel nous reviendrons en fin d’extrait car il est moins cité et objectivement moins connu que ROBERTSON….
« De toutes les illusions enfantées par l’optique, la plus séduisante et la plus merveilleuse est sans doute la fantasmagorie : mais à qui en devons-nous la découverte ?
Les uns prétendent que nous en sommes redevables aux Egyptiens; « les autres disent que c'est aux Grecs. Nous n'entreprendrons pas de résoudre cette question d'archéologie, et nous nous bornerons à citer quelques auteurs qui en parlent. Cardan, par exemple, dans son livre, dit, qu'il y avait à Memphis des prêtres initiés aux mystères de la Déesse Isis, qui, par des moyens surnaturels, jetaient dans le trouble et l'épouvante les nouveaux élus. Pour y parvenir ils leur faisaient subir diverses épreuves elles consistaient ordinairement a leur faire parcourir, les yeux bandés une certaine distance; on les soumettait à des jeûnes : d'autres fois, on leur faisait apparaître, dans un souterrain, des fameuses pyramides. »
Les simulacres de différentes personnes, sous les formes les plus effrayantes. - Strabon rapporte que de son temps, on fabriquait des instruments particuliers, qui, suivant leur construction différente, produisaient tantôt des images infiniment petites, tantôt des images considérablement amplifiée.
Le P. Kircher dit que l'on peut non seulement, au moyen de miroirs concaves et convexes y réfléchir les rayons sonores, mais faire aussi paraître des fantômes, ou toute autre sorte de spectres, capables d'épouvanter les esprits faibles et crédules. Il raconte même qu'un mathématicien employa cette méthode pour faire voir à Rodolphe II, empereur d'Allemagne, tous les empereurs romains, depuis Jules César jusqu'à Maurice, et cela d'une manière si vraie , que
tous ceux qui étaient présents ne doutèrent point - qu'il n'eût fait usage de la magie. Le P. Kircher assure tenir ce fait d'un témoin oculaire. Il va encore plus loin; affirmant qu' avec la machine qu'il décrit, on peut obtenir les mêmes phénomènes que produisaient les Anciens; car, ajoute-t-il, ils connaissaient les verres. La preuve qu'il en donne est tirée de l'usage qu’ils avaient de déposer, dans des urnes sépulcrales de verre , les ossements des personnes de distinction. Mais son témoignage se trouve en contradiction avec l'usage des Anciens, qui avaient l'habitude de conserver les corps sous, la forme de momies : car il existait à Rome et à Naples des catacombes creusées dans le sol, qui avaient la propriété de rendre les chairs presque inaltérables.
Le même auteur, au sujet de la lumière, dit, page 36 de son ouvrage : « La lumière est une émanation du soleil, elle subit différentes modifications, selon les différents corps ; car elle peut être réfrangée du réfléchie et dans ces dernier cas on en obtient des effets miraculeux. »
Jean-Baptiste Porta prétend avoir obtenu des résultats moins merveilleux, en adaptant, à un volet de fenêtre d'une chambre parfaitement close , un miroir convexe , qui répétait dans l'intérieur de cette chambre, les objets extérieurs qui passaient devant le verre il assure même que l'on observe les divers mouvements des personnes et des animaux , mais que les images paraissent renversées.
Nous aurions encore à citer une infinité d'autres auteurs., à la vérité moins connus et moins accrédités que ceux dont nous venons de parler mais qui tous ne pourraient que nous confirmer, que les Egyptiens , les Grecs et les Romains envoyèrent les illusions fantasmagoriques pour faire croire aux miracles. Ces peuples reconnurent presque universellement les augures, les auspices , la magie, les enchantements, les évocations , la puissance des influences planétaires, les opérations de l’alchimie, les différents genres de divinations, par les serpents, par les oiseaux, par les bâtons, etc. Ils eurent pour toutes ces puérilités le respect le plus religieux tant qu'ils ne furent point éclairés par le flambeau des sciences ; et, sans remonter si haut, les peuples modernes n'ont-ils pas cru aux sorciers et aux revenants ? C'est le plus bel effet de la science, que d'avoir éclairé les hommes, en combattant la superstition qui préfère ses erreurs à la divinité même.
C’est un des grands avantages de notre siècle, que la multitude d'hommes éclairés et instruits qui le peuplent. Cette raison épurée et approfondie, que la plupart d'entre eux ont su répandre dans leurs écrits , a contribué beaucoup à dessiller les yeux des nations qu'avaient fascinés l'imposture et l'ignorance.
Le P. Kircher comme nous j'avons vu plus haut, est un des auteurs qui ont traité de la fantasmagorie, mais il est loin d'en être l'inventeur.
Le récit qu'il en fait est aussi peu exact, que les moyens qu'il indique sont peu suffisants.
Ils ont cependant suffi à PHILIDOR, grâces à son intelligence pour en faire renaître les illusions:
l'appareil lugubre dont il entourait les spectateurs, l'importance qu'il y mettait, ne contribuaient pas peu à augmenter la magie de l’illusion, et à dérouter-le physicien scrutateur sur les moyens bien simples qu'il employait pour opérer ces prestiges. -Ce fut un double talent, que Philidor eut à un si haut degré, qu’il garda son secret assez p pour jouir d'une fortune considérable.
Le hasard souvent nous fait trouver ce que l'étude sérieuse refuse. Des amateurs découvrirent son secret, et en firent part à un physicien qui prétendit l'avoir connu avant l'inventeur, et lui ingénia un piège dont il sortit vainqueur, portant d'une main sa lanterne magique, et de l'autre, l'autorisation spéciale de faire voir aux vivants les ombres de leurs semblables.
Le nom du physicien dont je viens de parler est ROBERTSON ; il a corrigé et considérablement augmenté le secret dont il restait maître.
Il est impossible de mieux opérer la fantasmagorie., et de produire des effets plus merveilleux : tout amateur éclairé se plaît à lui rendre cette justice. C'est lui qui le premier a mis en spectacle ce genre d'amusement, de manière a faire honneur à son discernement a son instruction ; bravant tour à tour les morts et les éléments, cet intrépide physicien a excité la curiosité et l'enthousiasme des amateurs de la capitale, et d'une grande partie de ceux de l'Europe.
M. CHAI, célèbre professeur de physique et admiré de tous les savants, a bien voulu donner à Robertson le moyen de transmettre les corps opaques sur la toile; aussi l'a-t-il appliqué d'une façon tout à fait ingénieuse, en imaginant son tombeau, ses bustes, etc. C'est l’effet le moins connu de la fantasmagorie, le plus surprenant et le plus difficile a exécuter : ROBERTSON n'y laissait rien à désirer. Son talent ne se bornait pas à la seule fantasmagorie : démonstrateur de physique expérimentale, il savait charmer les yeux et les oreilles par une infinité d'expériences scientifiques. C'est chez lui qu'ont été faites publiquement celles du galvanisme , à l'époque de la découverte de ce fluide.
Mais ROBERTSON, en quittant la capitale, nous aurai t-il donc privés de son intéressant spectre ?
Non : M. LE BRETON, artiste aussi modeste qu'instruit, a succédé à cet habile physicien d'une manière non moins brillante. Sa fantasmagorie vaut au moins celle de son prédécesseur; son cabinet ne le cède en rien à celui de ROBERTSON et ses expériences, toutes choisies, prouvent l'instruction de cet artiste éclairé.
Les illusions optiques ne sont regardées que comme accessoires à ses séances, et n'en sont pas moins brillantes. La beauté de ses verres et l'exactitude du dessin, qui ne doivent pas surprendre ceux qui sauront qu'il en est l'auteur, sont sans contredire au-dessus de celles de ROBERTSON.
Je me plais à rendre justice aux talents de M. LE BRETON; et les personnes qui le connaissent applaudiront, sans doute avec empressement, à l'éloge véridique que je viens d'en faire.
Nous croyons en avoir dit assez sur l'histoire de la fantasmagorie : nous allons à présent en décrire les effets et les moyens de les produire. Pour l'intelligence de nos lecteurs, nous les diviserons en trois parties; nous nommerons la première , corps transparents ou fantascope; la seconde, corps opaques ou mégascope; la troisième, corps éclairés ou fanstasmagorie par réflexion : nous finirons par les ombres blanches ou vulgairement la danse des sorciers, et par la fantasmagorie au moyen de la fumée.
La fanstasmagorie ne souffre point de médiocrité si l'on veut donc bien la faire, on doit d'abord se procurer des appareils parfaitement bien confectionnés : c'est de leur justesse et de leur précision qu'en dépend la perfection; ce qui est encore très - essentiel et très difficile,
c'est l'habitude de la faire mouvoir. Un amateur qui connaît bien la partie peut parvenir, avec beaucoup d'exercice , à la pratiquer fort bien.
Tout se borne à éviter le bruit, à ne s'écarter jamais du foyer, à masquer tous ses moyens, et surtout à tacher que leur roideur ne fasse point naître dans l'esprit du spectateur l'idée de la lanterne magique : car cette seule idée détruirait une grande partie de l'illusion ».
Bibliographie :
Richard Raczynski :
Un tour du Monde de la Magie et des Illusionnistes, 2011,
Second tour du monde de la Magie et des Illusionnistes, 2012,
Troisième tour du monde de la Magie et des Illusionnistes, 2013,
Paris, Capitale de l’Art Magique, 2014,
Biblio Magica, 2016 (aux éditions Dualpha).
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